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Les lettres de Dreyfus
Les lettres de Dreyfus |
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Dreyfus-Briefe |
Source: Magazine pour la littérature, 1898, 67e année, N° 41 |
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Quelle: Magazin für Literatur, 1898, 67. Jg., Nr. 41 |
Les humains ayant une vision claire des processus de la vie doivent être convaincus depuis longtemps de l'irréprochabilité totale du malheureux prisonnier de l'île du Diable. Lorsque, chez ces personnes, le dégoût d'un bâillonnement sans précédent de la loi et l'enthousiasme pour la justice s'ajoutent à la vue claire, leur indignation doit se décharger dans des dénonciations aussi fortes que celles de Zola, Björnson et d'autres. |
01 |
Die Menschen mit einem klaren Blick für die Vorgänge des Lebens müssen längst von der vollkommenen Schuldlosigkeit des unglücklichen Gefangenen auf der Teufelsinsel überzeugt sein. Wenn bei solchen Menschen noch das Gefühl des Abscheus gegenüber einer beispiellosen Knebelung des Rechtes und der Enthusiasmus für die Gerechtigkeit zu dem klaren Blick hinzukommen, dann muß sich ihre Entrüstung in solch starken Anklagen entladen, wie sie Zola, Björnson und andere erhoben haben. |
On peut comprendre qu'il y ait en France des gens qui se rebellent contre le libre règne du droit en cette chose. Car qui sont ces gens ? Ceux qui craignent la révélation des faits réels, car ils ont joué un rôle dans l'affaire qu'aucun homme décent ne peut envier. Ceux qui, dans l'intérêt du parti, doivent prétendre être convaincus de la culpabilité de Dreyfus, car ils ont besoin de ce mensonge, commis devant eux, comme slogan du parti. Et ceux qui sont trop stupides, ou trop lâches, pour regarder les vraies circonstances. |
02 |
Daß es in Frankreich Leute gibt, welche sich gegen das freie Walten des Rechtes in dieser Sache auflehnen, ist begreiflich. Denn wer sind diese Leute? Solche, die sich fürchten vor der Enthüllung des wahren Tatbestandes, weil sie in der Angelegenheit eine Rolle gespielt haben, um die sie kein anständiger Mensch beneiden kann. Solche, die aus Parteiinteressen behaupten müssen, daß sie von der Schuld Dreyfus überzeugt sind, weil sie diese vor sich selbst begangene Lüge als Parteiparole brauchen. Und solche, die zu dumm, oder zu feige sind, um auf die wahren Verhältnisse den Blick zu werfen. |
En Allemagne aussi, nous avons des gens qui sont hostiles à l'idée de défendre le capitaine tourmenté. Ils jouent de plein gré à l'homme d'État et disent : nous ne devons pas nous mêler des affaires des Français. En même temps, ils menacent de faire naître le spectre d'une guerre franco-allemande. Il est vrai que personne n'a encore apporté la preuve qu'un éclaircissement de la chose, qui est enveloppée dans le brouillard des mensonges, de la passion des partis et de la corruption politique, pourrait contribuer le moins possible à une telle guerre. Mais une telle "menace spectrale" a un fort effet sur les masses ; et elle chatouille la vanité d'affirmer : j'ai une vision d'homme d'État et je parle d'un point de vue politique supérieur des pauvres agneaux naïfs qui se laissent emporter par une pitié humaine incomprise pour intercéder en faveur d'un homme qui - puisqu'il est français - ne les regarde pas. |
03 |
Auch in Deutschland haben wir Leute, die sich einem Eintreten für den gepeinigten Kapitän feindlich entgegensetzen. Sie spielen freiwillig Staatsmann und sagen: wir dürfen uns in die Angelegenheiten der Franzosen nicht mischen. Dabei drohen sie mit dem Gespenst eines deutsch-französischen Krieges. Es hat zwar noch niemand den Beweis erbracht, daß eine Aufhellung der in den Nebel der Lüge, der Parteileidenschaft und politischen Korruption gehüllten Sache das mindeste zu einem solchen Kriege beitragen könnte. Aber auf die Massen wirkt eine solche « Gespenstdrohung » stark ein; und es kitzelt die eigene Eitelkeit, zu behaupten: ich habe staatsmännische Einsicht und spreche von einem höheren politischen Gesichtspunkte aus über die armen naiven Lämmer, die sich von mißverstandenem menschlichen Mitleid hinreissen lassen, für einen Menschen einzutreten, der sie - da er doch Franzose ist - gar nichts angeht. |
Que les adversaires d'un plaidoyer en faveur d'un martyr de l'injustice, de l'illusion et de la corruption, animés par l'enthousiasme pour le droit et la liberté, aient quelque motif que ce soit ; une chose est vraie pour tous : ils n'ont pas le moindre jugement psychologique. Celui-ci n'a que celui qui est capable de décider, selon la nature entière d'un humain, s'il est ou non capable d'un acte qui lui est imputé. Toutes les personnes ayant un jugement psychologique pourraient dire avec certitude à partir de la conduite du capitaine Dreyfus avant, pendant et après sa condamnation : |
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Mögen nun die Gegner eines durch die Begeisterung für Recht und Freiheit hervorgerufenen Eintretens für einen Märtyrer der Ungerechtigkeit, Verblendung und Korruption was immer für Motive haben; eines gilt von ihnen allen: sie haben nicht das geringste psychologische Urteil. Ein solches hat nur derjenige, welcher nach dem ganzen Wesen eines Menschen zu entscheiden vermag, ob dieser einer Handlung, die ihm zugerechnet wird, überhaupt fähig ist, oder nicht. Alle Leute mit psychologischem Urteil konnten aus dem Verhalten des Hauptmann Dreyfus vor, während und nach seiner Verurteilung mit Bestimmtheit sagen: |
Cet homme doit être innocent. |
05 |
Dieser Mann muß unschuldig sein. |
Ces dernières semaines, une autre raison s'est ajoutée aux raisons que ces personnes ayant un regard psychologique avaient. Les lettres écrites par Dreyfus à sa femme de décembre 1894 à mars 1898 ont été publiées. Elles constituent un document psychologique de premier ordre. Je souhaite enregistrer sans réserve les sensations qui ont traversé mon âme à la lecture de ces lettres. Dreyfus est une personnalité avec des qualités que je déteste. Il est désagréable pour moi comme seul un être humain peut être désagréable pour moi. C'est un chauvin à l'esprit étroit. Il écrit à sa femme : "Vous souvenez-vous que je vous ai dit qu'il y a dix ans, lorsque j'étais à Mulhouse en septembre, j'ai entendu un corps de musique allemand célébrer l'anniversaire de la bataille de Sedan ? Ma douleur était alors si grande que je pleurais de rage, déchirais mes draps de lit de colère, et me jurais de consacrer toutes mes forces, toute mon intelligence, au service de ma patrie contre l'ennemi qui insultait ainsi la douleur des Alsaciens". La nature d'un soldat têtu est Dreyfus. Les cris d'indignation qu'il envoie à son épouse depuis sa prison, depuis son exil, ont tous un caractère mesquin. Aucune nature de lion ne se rebelle contre l'injustice immodérée, mais un petit patriote et homme social, qui se serait suicidé s'il ne s'était pas senti obligé de vivre jusqu'à ce que son "honneur" et la bonne réputation de ses enfants soient rétablis. Je ne défends aucun personnage qui me plaise ou qui soit grand, mais je parle contre le droit de la personnalité piétiné, contre la liberté jetée avec des excréments. Toute la vie de l'âme du martyr s'est réduite à quelques idées. Le grand nombre de lettres n'apporte qu'un seul cri de douleur en d'innombrables changements : "Mon cœur a saigné, il saigne encore, il ne vit que dans l'espoir qu'un jour on me rendra les tresses que j'ai acquises de façon noble et jamais souillées". Qu'est-ce que l'homme torturé n'a pas à dire à sa femme héroïque ! Comme une "idée fixe" imprègne les discours d'un fou, cette pensée imprègne toutes les lettres du prisonnier. Et son état doit s'apparenter à la folie. Sa vie intérieure est éteinte, sauf pour cette seule pensée. Il est clair pour tout psychologue que cette vie de l'âme a atteint un point qui devrait en faire un traître à sa propre culpabilité, s'il y avait une telle chose. Cet homme, poussé jusqu'à des idées fixes, avouerait aujourd'hui s'il avait quelque chose à confesser. |
06 |
In den letzten Wochen ist zu den Gründen, welche diese Menschen mit psychologischem Blick hatten, noch ein weiterer hinzugetreten. Die Briefe, die Dreyfus vom Dezember 1894 bis zum März 1898 an seine Gattin geschrieben hat, sind veröffentlicht worden. Sie sind ein psychologisches Dokument ersten Ranges. Ich möchte die Empfindungen rückhaltlos verzeichnen, die beim Lesen dieser Briefe durch meine Seele gezogen sind. Dreyfus ist eine Persönlichkeit mit Eigenschaften, die ich hasse. Er ist mir unsympathisch, wie mir nur ein Mensch unsympathisch sein kann. Er ist ein bornierter Chauvinist. Er schreibt seiner Gattin: « Erinnerst Du Dich, wie ich Dir erzählte, ich hätte, als ich vor zehn Jahren im September in Mühlhausen weilte, ein deutsches Musikkorps den Jahrestag der Schlacht von Sedan feiern gehört. Mein Schmerz war damals so groß, daß ich vor Wut weinte, meine Bettücher zerriß vor Zorn und mir zuschwor, alle meine Kräfte, meine ganze Intelligenz dem Dienste meines Vaterlandes gegen den Feind, der auf solche Weise den Schmerz der Elsässer beleidigte, zu widmen.» Eine verbohrte Soldatennatur ist Dreyfus. Die Entrüstungsrufe, die er aus seinem Gefängnis, aus dem Exil an seine Gattin sendet, tragen alle einen kleinlichen Charakter. Keine Löwennatur bäumt sich auf gegen maßlose Ungerechtigkeit, sondern ein kleiner Patriot und Gesellschaftsmensch, der sich selbst umgebracht hätte, wenn er sich nicht verpflichtet fühlte zu leben, bis seine « Ehre » und der gute Name seiner Kinder wiederhergestellt ist. Für eine mir sympathische oder große Persönlichkeit trete ich nicht ein, sondern ich spreche gegen das mit Füssen getretene Recht der Persönlichkeit, gegen die mit Kot beworfene Freiheit. Zusammengeschrumpft auf ein paar Vorstellungen ist das ganze Seelenleben des Gemarterten. Die große Anzahl Briefe bringen nur den einen Schmerzensschrei in unzähligen Veränderungen: « Mein Herz blutete, es blutet noch, es lebt nur in der Hoffnung, daß man mir eines Tages die Tressen, die ich auf edle Weise erwarb und niemals beschmutzte, zurückgeben werde.» Wie wenig außer diesem hat der Gequälte seiner heldenhaften Frau zu sagen! Wie eine « fixe Idee » die Reden eines Wahnsinnigen, so durchzieht dieser Gedanke alle Briefe des Gefangenen. Und sein Zustand muß ein wahnsinn-ähnlicher sein. Sein inneres Leben ist ausgelöscht bis auf diesen einen Gedanken. Für jeden Psychologen ist ohne weiteres klar, daß dieses Seelenleben bei einem Punkte angelangt ist, der es zum Verräter seiner eigenen Schuld machen müßte, wenn es eine solche gäbe. Dieser bis zu fixen Ideen getriebene Mann würde heute gestehen, wenn er etwas zu gestehen hätte. |
Les idées fixes de Dreyfus, cependant, sont celles qui constituent une preuve crédible de son innocence. Personne qui lit ces lettres avec un œil psychologique ne peut encore croire à la moindre culpabilité de cet homme. Ces lettres doivent être lues comme un témoignage monumental du fait qu'aujourd'hui, en République française, le droit de la personnalité, la liberté peuvent être écrasés, que l'homme peut être sans droits dans un État qui fonde son existence sur de prétendues libertés. |
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Dreyfus fixe Ideen sind aber solche, die ein glaubwürdiger Beweis seiner Unschuld sind. Niemand, der mit psychologischem Blick diese Briefe liest, kann noch an die geringste Schuld dieses Mannes glauben. Als ein mit monumentalen Worten sprechendes Zeugnis sollten diese Briefe gelesen werden, daß heute in der Republik Frankreich das Recht der Persönlichkeit, daß die Freiheit zerstampft werden kann, daß der Mensch rechtlos sein kann in einem Staate, der sein Dasein auf sogenannte Freiheitsrechte stützt. |
S'il y avait des juges, s'il pouvait y avoir des juges dans l'état actuel des choses qui ne rendent pas de jugements selon la lettre de la loi, qui sont une moquerie des faits, alors seules ces lettres seraient nécessaires pour sortir Dreyfus de son bannissement, pour l'absoudre de toute culpabilité, et pour lui accorder ce qu'il demande et ce dont il est encore capable. Mais les juges ne peuvent pas être des psychologues. Plus forte en leur faveur que la preuve d'innocence fournie par les lettres est la circonstance de savoir s'il y a un paragraphe ambigu quelque part qui peut être interprété de façon pointue en faveur ou contre le condamné. |
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Gäbe es Richter, könnte es bei den gegenwärtigen Staatsverhältnissen solche geben, welche nicht nach dem Buchstaben der Gesetze Urteile fällen, die den Tatsachen gegenüber wie Hohn sich ausnehmen, so bedurfte es nur dieser Briefe, um Dreyfus aus seiner Verbannung zu holen, ihn von aller Schuld freizusprechen und ihm zu gewähren, was er verlangt und wessen er noch fähig ist. Aber die Richter können keine Psychologen sein. Stärker für sie als der Beweis, den die Briefe für die Unschuld liefern, spricht der Umstand, ob es irgendwo einen vieldeutigen Paragraphen gibt, der spitzfindig zu Gunsten oder Ungunsten des Verurteilten ausgelegt werden kann. |